
Hideyuki SAWADA est professeur à l'université de Waseda, où il travaille sur la robotique et le traitement du son, de l’image et du toucher. Lors de son séjour en France, il partage son expérience sur l’intégration des sensations tactiles dans les interfaces humaines en tant que professeur invité.
Pouvez-vous nous parler de votre collaboration avec Taha Ajnada et Christophe Giraud-Audine ?
Le Dr Taha Ajnada m’a contacté l'année dernière parce qu'il s'intéressait aux études tactiles et, plus particulièrement, à la sensation du toucher. Comme je travaille également sur des dispositifs pour générer des sensations tactiles, j'ai trouvé cette proposition de collaboration très intéressante et j'ai décidé d'accepter l'invitation à séjourner aux Arts et Métiers. J'ai apprécié les discussions et les conférences que j’ai données aux étudiants et aux chercheurs. Nous envisageons d'échanger des étudiants entre nos laboratoires afin d'approfondir ce sujet de recherche.
Comment vous êtes-vous senti durant votre séjour ?
J'apprécie mon séjour ici, ainsi que les discussions avec les chercheurs d'Arts et Métiers. Après avoir discuté, nous avons identifié la nécessité de mettre en place un mémorandum d'entente entre les deux établissements pour initier la collaboration de recherche et les échanges étudiants. C’est la première étape habituelle pour mettre en place une nouvelle collaboration.
Que pensez-vous des collaborations avec d'autres pays ?
J'ai déjà visité la France plus de 50 fois en raison d'autres collaborations avec des universités de ce pays. C'est toujours un plaisir. La collaboration internationale apporte des idées différentes, peut-être dues à des cultures différentes, qui fournissent des points de vue variés pour le développement de la recherche. En outre, je pense que l'internationalisation des étudiants dans les laboratoires est très importante.
Est-ce que cela a permis d’enrichir vos recherches ?
Ma collaboration avec Taha et Christophe porte sur des études tactiles, axées sur la mesure et la présentation de diverses sensations tactiles. L’objectif est de permettre une communication qui passe non seulement par le biais d'informations visuelles et auditives, mais également par celui d'informations tactiles. Nous utilisons un actionneur spécial avec des alliages à mémoire de forme pour créer de petites vibrations allant jusqu'à un kilohertz. En touchant l'actionneur, différentes sensations tactiles peuvent être ressenties et reconnues. L'élément central de cette nouvelle collaboration est l’utilisation d'un nouveau matériau, différent des dispositifs piézo-électriques.
Je travaille également avec d’autres universités françaises, notamment sur le traitement des images, l'apprentissage automatique et les technologies mécatroniques, mais l'étude des sensations tactiles est une exclusivité avec les Arts et Métiers. L'échange d'étudiants sera un moyen efficace d'étendre la collaboration. Des étudiants des Arts et Métiers resteront dans mon laboratoire pour travailler avec mes étudiants sur le développement de ces dispositifs tactiles. Je prévois également d'envoyer mes étudiants ici aux Arts et Métiers.
Comment est né ce sujet de recherche ?
J'appréciais beaucoup la physique et les mathématiques lors de mes études à l'université de Waseda, ainsi que leurs applications aux dispositifs et systèmes d'ingénierie. Après ma maîtrise, j'ai travaillé dans une entreprise privée, mais j’avais l’envie d’écrire des articles sur les résultats de mes recherches. J'ai donc quitté mon emploi après trois ans, et je suis retourné à l'université réaliser un doctorat. C’est ainsi qu’il y a une vingtaine d'années, j'ai commencé mes recherches sur la télécommunication bilatérale au travers de sensations tactiles.
À l'époque, nous ne pouvions utiliser que des informations visuelles et auditives. J'ai reconnu l'importance des sensations tactiles pour améliorer les interfaces humaines et les télécommunications. Nous avons mis au point de nouveaux actionneurs utilisant un alliage à mémoire de forme pour offrir différentes sensations tactiles.
Vous avez également un intérêt particulier pour l’IA et l’apprentissage automatique. Qu’est-ce qui l’a suscité ?
J'ai commencé à traiter le sujet IA et l'apprentissage automatique pendant un laboratoire de recherche au cours de ma quatrième année d'études de premier cycle. Au Japon, tous les étudiants travaillent dans des laboratoires de recherche pour leurs thèses de fin d'études. La fin des années 1980 et le début des années 1990 ont été marqués par le deuxième boom des réseaux neuronaux et de l'apprentissage automatique, et j'ai assisté à des cours sur la théorie mathématique de l'apprentissage automatique, ce qui m'a permis d'acquérir de bonnes connaissances sur les théories des réseaux neuronaux. Dans le cadre du projet de laboratoire, j'ai écrit des codes et je les ai testés pour la génération automatique et la compréhension de la musique.
Jusqu'à présent, j'étudie la théorie mathématique de l'apprentissage automatique et j'essaie de l'appliquer à différents domaines, notamment le contrôle robotique, l'extraction de connaissances à partir de nouveaux phénomènes physiques et le développement d'une IA explicable.
Quels conseils donneriez-vous aux étudiants intéressés par une carrière de chercheur dans votre domaine ou dans tout autre domaine ?
Je voudrais simplement conseiller aux jeunes étudiants de profiter des nouvelles découvertes qu'offre la recherche. Avoir une activité de recherche est intéressant et apporte des visions nouvelles, des discussions riches et des découvertes pour lesquelles une reconnaissance internationale est possible grâce aux publications scientifiques.
Son parcours
Né le 7 août 1967 à Hanyu-city, dans la préfecture de Saitama au Japon, il obtient son diplôme d'ingénieur à l'université de Waseda en 1992. Après avoir travaillé chez Mitsui Mining & Smelting Co. Ltd. jusqu’en 1995, il a repris ses études et obtenu son doctorat en 1999. Il a été chercheur et professeur associé à l'université de Kagawa jusqu'en 2009, puis a obtenu un poste de professeur titulaire en 2010. Depuis 2017, il est professeur à l'université de Waseda.